DE LA BIBLIOTHÈQUE STÉPHANE MALLARMÉ
Manuscrit d’un des chefs-d’œuvre de la poésie
Un coup de Dés jamais n’abolira le Hasard
Sotheby’s va organiser le 15 octobre prochain la vente de la bibliothèque de Stéphane Mallarmé, rare ensemble parfaitement préservé, que le public découvrira pour la première fois. En 283 lots, cette collection émouvante nous invite à pénétrer dans l’intimité d’un écrivain de génie : ses poèmes de jeunesse, ses amitiés littéraires et artistiques, son travail, ses souvenirs... Manuscrits, livres avec envois, photographies, correspondance sont autant de témoignages sur son travail, ses passions, ses amitiés : Huysmans, Verlaine, André Gide, Paul Valery, Edouard Manet. Ce fonds d’une incroyable richesse, plus tard complété par l’achat de manuscrits qui avaient quitté la famille ou de lettres que Mallarmé avait envoyées, nous offre le privilège d’entrer dans l’atelier du poète.
Les œuvres majeures de Mallarmé figurent dans cette collection, certains exemplaires sur grand papier, beaucoup avec envoi autographe, tel que L’Après- midi d’un faune sur Japon, cadeau fait à sa fille Geneviève, alors âgée de 12 ans, ou encore la traduction du Corbeau d’Edgar Allan Poe illustrée par Edouard Manet. Mais surtout, les différents états manuscrits ou imprimés de son chef-d’œuvre, Un coup de Dés jamais n’abolira le Hasard, depuis un premier jet manuscrit du poème jusqu’à l’édition originale de 1914, en passant la première publication en revue, l’impressionnante maquette manuscrite, restée longtemps inconnue jusqu’en 1998, année du centenaire de la mort de Mallarmé et un ensemble important d’épreuves corrigées.
Le chef-d’œuvre de Stéphane Mallarmé : Un coup de Dés jamais n’abolira le Hasard
Ce fonds renferme en effet l’exceptionnel avant-texte autographe d’Un coup de dés, paru en 1897. Composé en vers libres, ce manuscrit mythique est l'un des tout premiers poèmes typographiques de la littérature française. Très spontané et aérien, il est une véritable révolution poétique et graphique par la disposition spatiale des mots, mais aussi par le jeu des corps des caractères (estimation : 60.000-80.000 €).
Quelques mois avant la parution d’Un coup de Dés dans Cosmopolis (mai 1897), Ambroise Vollard, propose à Mallarmé d'éditer un de ses poèmes et de commander des illustrations à Odilon Redon. Mallarmé réalise alors lui-même la mise en page exacte du poème comme il voulait le voir imprimé. Véritable emblème moderniste, le poème connut un rayonnement considérable, adulé par l’avant-garde et ne cesse, depuis l’édition originale de 1914, d’être réinterprété (estimation : 500.000 – 800.000 €).
La mort inopinée du poète interrompt brutalement les travaux, et Vollard devra abandonner définitivement le projet d’édition.
La collection comprend l’ensemble le plus complet des jeux d’épreuves connus pour Un coup de dés jamais n’abolira le hasard de l’édition définitive chez Vollard. Entre août et novembre 1897, Firmin-Didot imprima successivement 5 épreuves différentes, chacune tirée à plusieurs exemplaires : l'une que Mallarmé devait renvoyer à l'imprimeur avec ses corrections, l'une qu'il gardait pour lui-même comme "témoin" et les autres qu'il offrait à ses amis, sans corrections. Cet ensemble comporte 6 épreuves différentes, il s’agit du plus complet jamais rassemblé (estimation : 100.000 – 150.000 €).
Son panthéon littéraire : Edgar Allan Poe et Charles Baudelaire
L’exemplaire véritablement unique des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire que possédait Mallarmé permet de faire le lien avec ce qui, dans cette collection, concerne aussi la plupart des auteurs majeurs de la seconde moitié du XIXe siècle, de Baudelaire et Flaubert à Wilde, Gide et Valéry, en passant par Villiers de l’Isle-Adam, Zola, Verlaine, Huysmans, Laforgue, Barrès et Jarry.
L’exceptionnel exemplaire de Stéphane Mallarmé des Fleurs du Mal par Charles Baudelaire comprend les six poèmes censurés que le poète, alors âgé de 19 ans, recopie en fin de l’exemplaire (estimation : 80.000-120.000 €). Toute sa vie il conservera ce volume qu’il fera relier. Baudelaire occupera toujours une place de choix dans son panthéon. Son influence sur le jeune poète est profonde et durable. Le premier poème qu’il publia en est d’ailleurs inspiré.
C’est dans la continuité de Baudelaire qu’il entreprit dans les années 1870 de traduire les poèmes d’Edgar Poe, poète qui, avec Baudelaire, a plus influencé Mallarmé. C’est pour mieux le lire qu’il dit avoir appris l’anglais.
Le Corbeau, magnifique poème de l’Américain Edgar Poe, traduit par Mallarmé et illustré par Edouard Manet, 1875, est sans doute l’exemplaire le plus complet connu avec les illustrations sur Hollande, Chine ou Japon (estimation : 80.000-120.000 €). Il est complet de sa rare couverture et accompagné d’une encore plus rare affiche de libraire sur similiparchemin. Malgré la grande exigence des deux artistes, la publication sera un échec, libraires et public ne comprenant pas les partis pris novateurs.
Le premier livre illustré de peintre
Autre livre illustré par Edouard Manet, L’Après-midi d’un faune, 1876, fut offert par Mallarmé à sa fille Geneviève, trop jeune pour comprendre les « choses » de son père, ainsi que le dit Mallarmé dans son charmant envoi. Cette édition originale sur Japon de ce chef-d’oeuvre symboliste, l’un des premiers livres de peintre, est illustrée de quatre dessins d’Edouard Manet (estimation : 30.000- 50.000 €). Mallarmé participa personnellement à l’édition de ce recueil poétique : les cordons de soie rose et noire, les gravures, les rehauts de lavis rose par Manet et la couverture en "feutre de Japon" en font un objet de raffinement extrême.
Stéphane Mallarmé, journaliste de mode.
La collection illustre une facette moins connue de l’écrivain avec la rarissime collection complète de la revue bimensuelle La Dernière mode, Gazette du monde et de la famille, 1874, corrigée de la main de Mallarmé. Il en était le rédacteur unique, signant ses articles sous divers pseudonymes : Marguerite de Ponty, Miss Satin, Ix, "Le Chef de bouche de chez Brébant", et même "Une dame créole", "Olympe, Négresse" ou "Zizy, bonne mulâtre de Surate". La seule contribution littéraire que Mallarmé signa de son nom est la traduction de "Mariana" de Tennyson. Le poète s’exerce dans le cadre imposé de l’art de la toilette à l’art de la table, en passant par les voyages en chemin de fer ou le courrier de lecteurs et même l’écriture publicitaire -- à une écriture totalement différente de celle qu’il pratiquait habituellement (estimation : 40.000-60.000 €).
L’album ayant appartenu à Méry Laurent contient des vers, dessins et divers autographes des nombreuses personnalités qui fréquentaient son salon parisien, au premier rang desquels était Mallarmé. Le poète écrivit dans l’album de son égérie pas moins de 89 poèmes autographes et 4 originaux (estimation : 50.000 – 80.000 €).
Ces poèmes sont, pour la plupart, aujourd’hui répertoriés dans les Vers de circonstance. Modèle de Manet qui inspira Mallarmé, Proust et Zola, Méry Laurent fut le grand amour de Stéphane Mallarmé. Les dédicaces témoignent des différents milieux dans lesquels cette demi-mondaine évoluait. Parmi les signatures, on peut distinguer ces principaux cercles artistiques, littéraires.
Souvenirs
Parmi les souvenirs, le portrait que fit Edgard Degas de son ami Mallarmé, le 16 décembre 1895 dans l'appartement de la jeune Julie Manet, la pupille de Mallarmé. De très grand format est un jeu de regards entre Stéphane Mallarmé debout, adossé contre le mur, le regard baissé vers son ami Auguste Renoir, lequel assis fixe l'objectif derrière lequel se trouve Edgar Degas (estimation : 40.000 – 60.000 €). Selon Valéry, cette photographie est "le plus beau portrait de Mallarmé que j'ai vu, mis à part l'admirable lithographie de Whistler".
Autre lot émouvant, un galet ramassé à Honfleur, l’été 1894, sur lequel Mallarmé écrit de sa belle écriture deux vers à l’encre, probablement pour son épouse Marie : "Tant mieux si la mer affame, la parfaite bonne femme SM". Mallarmé a écrit de nombreux petits poèmes de circonstance sur des supports très divers : carafes de Calvados, éventails, enveloppes des fameux quatrains-adresses, livres, oeufs de Pâques, photographies, cadeaux de fruits glacés, de théières, mouchoirs, etc. ou galets d’Honfleur qu’il adressait à ses proches (estimation : 5.000 – 8.000 €).
*Les estimations sont hors commission d’achat et les prix inclus le prix marteau et la commission d’achat
Sotheby’s réunit les collectionneurs à travers les oeuvres d’art depuis 1744. Sotheby’s est devenue la première maison de vente internationale depuis qu’elle s’est développée à New York depuis son siège londonien (1955). Elle fut la première à tenir des ventes à Hong Kong (1973), en France (2001), et en Chine (2012). Aujourd’hui, Sotheby’s est présente dans huit salles de ventes incluant New York, Londres, Hong Kong et Paris. Sotheby’s avec ses Services Financiers est la seule société de financement artistique au monde et elle offre l’opportunité d’enchérir dans 70 domaines de collection incluant S|2, galerie d’exposition-vente du département d’art contemporain, Sotheby’s Diamonds et le Vin. Sotheby’s possède un réseau mondial de 90 bureaux dans 40 pays et est la plus ancienne société du New York Stock Exchange (BID).
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